Aventure gastronomico-culturelle pour Q et moi, qui prenons de bon matin le train pour Nankin. La journée s'annonce plutôt belle, même si la brume omniprésente de la pollution limite quelque peu la visibilité. La température est en hausse et se révélera vite agréable. Une nette amélioration par rapport à ces derniers jours.
Nous quittons la gare à pied pour longer les rives du lac 玄武
王安石
En plus d'une vaste réforme fiscale, Wang Anshi augmente les salaires des fonctionnaires pour lutter contre la corruption, élargie la base de recrutement de ceux-ci en ouvrant des centres de formations, et instaure des milices paysannes pour améliorer la sécurité dans les campagnes. Cet environnement propice voit la création de nombreuses institutions caritatives et sociales, mais également de fortes résistances, tant de la cour que d'une partie de la population qui voit ses acquis remis en cause.
La réaction des conservateurs ne se fera pas attendre, et après avoir réussi à sauver ses réformes une première fois, Wang Anshi devra s'effacer à la mort de Shenzong. S'en suivra alors une période d'incertitude et de conflit, les conservateurs s'employant à annuler l'une après l'autre chaque mesure, au prix d'une grande agitation sociale, laissant quelques trente ans plus tard un pays exsangue à la merci de l'invasion des Jürchen, peuple de Mandchourie qui occuperont le Nord du pays et y établiront la dynastie Jin.
La promenade est des plus agréables. De nombreux retraités dansent, font du tai chi ou tout simplement papotent près des arbres dans lesquels ils ont suspendu la cage de leur oiseau chanteur, ravi de pouvoir piailler à loisir.
Sous l'abri d'une coursive, deux hommes jouent aux échecs chinois tandis que les 4 spectateurs qui les entourent se disputent sur les coups que l'un et l'autre devraient jouer. Un groupe d'enfants, en vacances, se livre à une sorte de jeu de piste entre les arbres sous l’œil vigilant de leurs accompagnateurs, tandis que deux retraités, écoutent 青藏高原
Passé la porte Xuanwu, l'atmosphère change du tout au tout. 湖南路
Nous passons un peu de temps dans une grande librairie. C'est le genre d'endroit que j'aime particulièrement, et l'un des avantages des grandes villes. Bien en évidence, à l'entrée, trône le pavé de Xi Jinping, le président chinois, sur l'art de gouverner la Chine. Celui qui a eu le contrat de sa publication a dû se faire une fortune : on le trouve partout ! Plus haut, dans les étages, nous retrouverons ce livre par rayonnages entiers dans la section dédiée à l'apprentissage du chinois par les étrangers, traduits dans toutes les langues possibles et imaginables !
De retour sur Hunanlu, nous entendons une immense clameur. Elle vient du QG de l'armée de terre, où des militaires en rang d'oignons applaudissent à l'unisson et avec cette spontanéité toute martiale le passage d'un haut gradé. Pas un geste de travers, pas un bouton qui dépasse ; pas à dire, une scène de liesse comme on en voit peu souvent : ils ont l'air de vraiment s'éclater !
Comme souvent ces dernières années, nous déjeunons à 南京大牌檔
Nous prenons ensuite le métro. S'il s'étend encore, le réseau est déjà fort vaste. Les tarifs, qui partent d'un modeste 2元 (auquel mes souvenirs m'avaient habitués), augmentent avec la distance souhaitée... jusqu'à 14元 pour 84 km, et 1元 supplémentaire tous les 3 km au-delà ! C'est impressionnant pour un réseau qui semblait en retard sur celui de Shanghai (il est longtemps resté à 2 lignes), mais qui en réalité attendait son heure !
Notre objectif, c'est le musée de Nankin, situé près des ruines de 明故宫
Récemment rénové après un vaste chantier de quatre ans, ce musée qui en surface n'a l'air de rien se révèle immense dans ses profondeurs et fort bien doté. Peinture, calligraphie, pièces archéologiques... Nous admirons tout particulièrement la peinture réaliste de 陈之佛
Au tout dernier étage, une petite exposition temporaire rassemble les pièces représentant ou évoquant le singe, dont l'année est sur le point de commencer, avec tout naturellement en vedette Sun Wukong, le héros de la Pérégrination vers l'Ouest, le plus célèbre d'entre eux.
À 17h, lors de la fermeture du musée, nous reprenons le bus puis flânons autour de 夫子庙
Nous avons depuis quelque temps déjà l'habitude saugrenue de collectionner chaque année une petite peluche à l'effigie de l'animal dont l'année chinoise est en cours. Cette fois, cependant, bien que le sujet s'y prête tout particulièrement, les peluches disponibles ne nous convainquent pas. Impossible d'en trouver un qui ait l'air espiègle ou farceur ; au mieux peut on les trouver stupides... Finalement, nous nous rabattons sur un petit Sun Wukong. Certes il n'est pas rouge, mais il donne enfin l'impression d'être un peu dégourdi.
Nous quittons le Temple de Confucius pour 新街口
Cette année, toutefois, le restaurant nous laisse une impression mitigée. Si le canard est très bon, le service un peu bâclé et l'hygiène... hésitante nous frappent tout particulièrement. Devenons-nous plus exigeants ou bien le fait d'avoir une vue sur les cuisines en est-il la cause ? Toujours est-il que nous décidons que la prochaine fois nous essaierons un autre endroit pour notre dose annuelle de canard laqué !
Le retour à Danyang en train s'effectue sans encombre. Trouver un taxi à l'arrivée est une autre paire de manche. Bien que ce ne soit pas très loin, il faut en effet compter une bonne heure de marche, et Q, enceinte, a déjà beaucoup marché aujourd'hui. Le problème, c'est qu'il y a des taxis, des dizaines même, et qu'ils sont agressifs dans leurs sollicitations. Seulement, aller en ville ne les intéresse pas : ils cherchent des clients prêts à payer (de préférence à plusieurs et au noir !) leur retour chez eux, à la campagne. Seule solution : nous éloigner de la gare, où nous trouvons finalement assez facilement un taxi "régulier" qui nous ramènera.
Crédits
- Il était une fois la Chine. 4500 ans d'histoire, José Frèches, XO Editions, 2005
- Wang Anshi, Wikipédia, consulté le 22/11/2016
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