Comme en France, le 1er mai est férié en Chine, et correspond à la fête du travail. Par contre, ce n'est pas un jour traditionnel de défilement syndical dans les grandes villes ! Nous allons passer la journée chez une tante à Q, avec certains de ses cousins/cousines et leurs enfants, des membres de la famille que je connais bien et revois régulièrement depuis plusieurs années.

Avant de partir, nous devons préparer des cadeaux pour ceux qui invitent. Dans ce genre de situation, comme nous sommes somme toute assez peu au fait des coutumes en la matière, ce sont les parents de Q qui prennent les choses en main. Il faut dire que plutôt qu'offrir du thé ou tout autre chose pour lesquels les Chinois ne comprennent pas qu'on puisse y mettre le prix, les cadeaux consistent en deux bouteilles d'alcool de riz et une immense cartouche de cigarettes ; dès qu'il s'agit d'alcool ou de tabac, les Chinois sont toujours prêts à se ruiner (à la fois le porte-feuille et la santé).

C'est une cousine de Q et son mari, qui habitent à proximité, qui nous emmènent en voiture, un autre cousin de Q se chargeant des parents. La tante chez qui nous nous rendons habite en effet à la campagne, à 20 minutes de route de Danyang, non loin de chez la grand-mère maternelle de Q qui sera elle-aussi présente.

Pour les trajets en voiture, cela fait des mois que Q et moi nous demandions comment nous allions faire avec L. Dans les taxis, où il n'y a ni ceinture ni siège auto, nous n'avons d'autre option que de le tenir sur nos genoux. Dans le cas d'une voiture privée, si les ceintures sont accessibles (c'est le cas aujourd'hui), nous appliquons la seule solution qui nous paraît envisageable : je m'attache, puis je place L dans le porte-bébé ventral, au-dessus de la ceinture, et je l'entoure de mes bras. Ce n'est pas idéal, mais c'est mieux que rien. Cela fait qu'à l'arrière, seuls L et moi sommes attachés, mais qu'importe : les autres font ce qu'ils veulent de leur vie.

À l'arrivée, L reçoit les inévitables pochettes rouges, contenant de l'argent, et offertes dans les occasions telles que le Nouvel An, les mariages, ou comme dans le cas présent la première fois que l'on voit un enfant.

Comme à chaque réunion de famille, le repas est pantagruélique, avec ses dizaines de plats différents. Et comme toujours, cette habitude à laquelle je ne me ferai sans doute jamais d'amener de grandes quantités de riz et de pâtes une fois que nous sommes tous bien gavés en 菜 cai4 (plats)... Comme de coutume, les hommes fument et boivent. À cinq, ils finissent deux bouteilles d'alcool de riz de 500 mL et plusieurs litres de bière !

L'après-midi, beaucoup jouent aux cartes. Il est assez étonnant de voir qu'en Chine il est très courant de jouer de l'argent, surtout en famille. Même si les sommes restent "modestes" (de l'ordre de la dizaine d'euros), c'est une coutume très différente de celles de ma propre famille où se serait inconcevable. Quant à moi, je passe quelque temps à écrire et m'occupe avec Q et ceux qui le souhaitent de L, qui dormira en tout et pour tout une demi-heure en deux micro-siestes, et se révèle donc difficile à tenir.

En fin d'après-midi, je pars faire une petite promenade aux alentours avec Q et la femme de son cousin. Ce petit quart d'heure à travers champs fait un bien fou, et montre que la Chine, même ici, ne se résume pas aux villes gigantesques.

champs
Il reste (encore) une Chine rurale dans le delta du Yangtsé.
Village
Une vue du village.
seigle
À la tête de la plante, je penche pour du seigle.
Tombes
Bien que ce ne soit plus autorisé à présent, les villageois étaient jusqu'à récemment enterrés près de l'endroit où ils ont vécu.

C'est un peu inquiets que nous nous faisons ramener en voiture. Même si les conducteurs ont un peu dessoûlé, je doute que ces quelques heures à jouer aux cartes aient vraiment suffi et il doit encore leur rester une dose d'alcool tout à fait respectable dans le sang. Si d'un point de vue comportemental l'habitude les amène à très bien tenir l'alcool (à des doses où d'autres seraient depuis longtemps réduits à l'état de loque), les effets néfastes sur leurs réflexes doivent eux bel et bien être présents.

À la maison, pendant que nous mangeons et préparons L pour la nuit, le bruit de nombreux pétards et feux d'artifice se fait entendre. Les Chinois en tirent pour toutes les occasions heureuses (Nouvel An, mariages, etc.) et un jour férié comme celui-ci est l'occasion rêvée. En dépit du réel danger que représente l'usage libre de feux d'artifice, le gouvernement chinois n'a jamais réussi à les interdire, tant une telle mesure serait impopulaire (même si une tentative, depuis avortée, a eu lieu à Pékin il y a quelques années).

Une fois L couché, Q et moi sortons nous promener. Dans la plupart des villes chinoises, on croise à la tombée de la nuit de vastes groupes de danseurs amateurs (principalement des femmes) qui se réunissent autour d'une sono et d'un professeur sur une place ou un vaste trottoir pour danser en ligne. Le prix est symbolique (de l'ordre de 2 ¥ par mois) et c'est un excellent moyen de garder la forme. Ce soir, Q et moi nous sommes discrètement joints à un groupe et nous efforçons (moins discrètement) de suivre leurs mouvements. C'est parfois difficile !

Danse de rue
Danse de rue.

La danse achevée, nous pénétrons dans un lotissement d'une vingtaine de tours construites au cours de l'année passée, là où il n'y avait précédemment que des champs. Un feu d'artifice y est lancé, entre les immeubles, lesquels culminent plus haut que l'altitude maximale atteinte par les fusées, ce qui fait qu'elles explosent littéralement au milieu ! Impressionnant... et inquiétant, car si une fusée dévie, l'incendie ou les blessés ne sont pas loin !