Vers 6h30, la bande de braillards qui s'est jurée de m'empêcher de dormir est réveillée... et le fait savoir. Hurlements, claquements de portes... on dirait qu'ils sont au moins vingt (même si les tasses laissées dans l'atrium me font penser qu'ils étaient plutôt 6 ou 7). Q et moi avons une furieuse envie de sortir les secouer un peu, mais j'ai encore trop la flemme pour ça. En attendant qu'ils veuillent bien s'en aller, je dis des bêtises, comme quoi c'est une conspiration et qu'ils se sont sciemment organisés, avec les préposés aux cris, et celui, placé près d'une porte, qui la claque en cadence. Le pire, c'est que le résultat ne serait en rien différent !

À 7h, ce sont les parlophones des guides accompagnant les premiers groupes de touristes qui se font entendre dans la rue. De guerre lasse, nous nous apprêtons et sortons à notre tour. Même si le réveil a été un peu brutal, il fait un temps magnifique, et la journée s'annonce agréable.

Hongcun, ciel bleu
Hongcun sous un beau ciel bleu qu'on n'a plus l'habitude de voir en Chine
Toit et bambous
Vue des toits et des bambous omniprésents
Foule dans les ruelles
Quand on parle de ruelles "encombrées", c'est que cela ressemble parfois à ça !

Hongcun est un village préservé, dans lequel vivent encore de nombreux habitants, pour la plupart vivant des activités touristiques (hébergement, restauration, visites, boutiques, arnaques, etc.). De nombreuses maisons anciennes se visitent. Parmi les spécialités, on trouve le 毛豆腐 mao2dou4fu, sorte de tofu frit dont l'intérieur est crémeux et l'extérieur comme couvert de poils (d'où le nom), servi avec une sauce puante et pimentée, que je soupçonne être la même que celle du "poisson puant" de la veille. Je n'aime pas trop le tofu, mais je goûte néanmoins. Comme je m'y attendais, ça ne m'emballe guère.

Tofu poilu
Le tofu "poilu", spécialité du cru
Piments
On y vend également de la dynamite alimentaire... pardon, des piments !

Après un rapide petit déjeuner, nous parcourons les jolies rues de ce village, en évitant celles où la foule est trop nombreuse. Bien que les deux-roues et les klaxons soient théoriquement interdits de 8h à 18h dans l'enceinte du village, les habitants ne se font pas prier pour lancer leurs motos où scooters dans les ruelles bondées, écartant la foule à grands coups d'avertisseur sonore. On croise également des mules ou des petits chevaux, principalement affectés au transport des matériaux de construction.

Toit de tuiles
Les toits de la région sont couvert de tuiles grises très serrées
Bas relief d'une porte
Détail des bas-reliefs d'une porte
Porte
Porte
Pompiers
Les pompiers de Hongcun sont bien équipés pour intervenir dans les petites rues

Les toits des maisons sont assez intéressants, d'une forme très différente de ce qu'il est habituel de croiser dans le Jiangsu (d'où vient Q).

Toits typiques

Dans les ruelles, nous achetons un petit dauphin articulé pour L. Fait de bois collé sur un tissu, il évoque à G les poissons découpés dans les plats servis au restaurant. Moi, il m'évoque plutôt les fabuleuses réalisations de la Galerie des Machines, à Nantes. Nos amis prennent un écureuil de facture similaire pour le petit bonhomme. Bien que ce ne soit pas artisanal (ça le pourrait à la base, mais comme tout le monde vend ça, ça sort clairement d'une usine), nous pensons que ce petit souvenir plaira à L, qui nous manque déjà beaucoup.

Dauphin articulé

Nous visitons ensuite un magasin de thé, où nous dégustons trois thés de la région (deux 黄山毛峰 Huang2shan1 mao2feng1 et un 猴魁 Hou2kui2). Les premiers sont obtenus à partir des théiers plantés sur les coteaux le long de la route emprunté la veille, et les feuilles sont chauffées au wok à charbon dans les boutiques même. Le second est un thé dont les feuilles sont manuellement étirées, ce qui prend du temps, et explique le prix sensiblement plus élevé. En plus de ces deux thés verts, nous prenons également du 祁门红茶 Qi2men2 hong2cha2, un thé noir de la région.

Feuilles de thé fraiches
Les feuilles de thé vert avant le passage au wok
Feuilles de thé passées au wok
La difficulté de l'opérateur est de chauffer les feuilles au bon degré, sans qu'elles ne brûlent (ce qui donnerait un goût désagréable au thé)
Thés locaux
Un éventail de thés locaux (en bas à droite, le Huangshan Maofeng, à sa gauche le Houkui et en haut à droite le Qimen Hongcha)
Lorsque nous quittons la boutique, c'est avec un chargement de thé impressionnant, et en ayant beaucoup trop bu !

Nous récupérons nos sacs à notre "hôtel" et gagnons la sortie de la ville. La vendeuse de thé nous rattrape en scooter : elle a oublié de nous compter un thé et nous avons besoin de payer 80元 de plus. Elle a su que nous étions partis en interrogeant les logeurs. Une chance pour elle !

En attendant notre chauffeur, nous visitons le marché couvert à la sortie de la ville. Q m'achète pour 5元 un pot à crayon en bambou. À titre d'expérience, je me rends seul voir la même chose chez ce même marchand (qui ne m'avait pas repéré) et il m'annonce un prix de 10元. Si je ne m'étais pas adressé à lui en mandarin, peut-être m'en aurait-il demandé 20 !

Plantations de thé
Le Huangshan Maofeng est produit par ces théiers, à flanc de colline, souvent sur des pentes à 45° !

Le chauffeur nous ramène dans la partie touristique de la ville de Huangshan (où se trouve la gare), dans les 老街 lao3jie1 (vieilles ruelles). Nous passons l'après-midi à flâner avec nos amis dans les boutiques, en achetant de temps à autre quelques babioles à droite ou à gauche. Nous effectuons la courte visite d'un petit musée situé dans cette rue, qui présente des pièces des époques Qing, Ming, et plus rarement Han. Il y a notamment un beau lit en bois sculpté, version grand luxe de celui dans lequel nous avons dormi cette nuit, des ivoires sculptés et des tigres en pierre assez mignons.

Vieilles ruelles de Huangshan
Les "vieilles ruelles" de la ville de Huangshan
Apothicaire
Une pharmacie traditionnelle. Chaque tiroir contient un ingrédient à visée médicinale.
Lit traditionnel
La version grand luxe de notre lit de la nuit dernière
Chang'e
Cet ivoire sculpté représente Chang'e, la dame de la Lune

Vers 17h30, nous invitons nos amis au restaurant avant qu'ils ne gagnent l'aéroport et de là Pékin. Le repas est bon et la patronne sympa (elle prend à cœur notre désir de ne pas trop commander de plats, et nous prend en photo avant que nos amis ne sautent dans un taxi).

Pêcheur
Pêcheur sur le fleuve, dans le reflet de la lumière d'un pont

Quant à nous, nous préférons marcher jusqu'à la gare, située à 5 km environ. Q achète un sac de pousses de bambou fraiches, faciles à trouver dans cette région. Nous traversons une place où trois équipes de 广场跳舞 guang3chang3 tiao4wu3 (danse en groupe en plein air) s'entremêlent en dansant sur trois musiques radicalement différentes !

Notre train part à 22h17 pour arriver à Danyang vers 6h30. Seulement, comme il n'est pas possible de choisir les petites gares comme terminus lors des réservations en ligne, notre billet ne couvre que le voyage jusqu'à Nankin. C'est donc lors de l'arrêt dans cette gare que le dragon qui nous sert de chef de wagon nous établit deux billets "assis" pour Nankin-Danyang et nous expédie manu-militari dans le wagon suivant, car il serait inconvenant de demeurer plus longtemps dans notre compartiment "couchettes" désormais vide de tout occupant !

Lorsque nous arrivons chez les parents de Q, il est 7h30. L reste un temps incrédule en nous voyant à la porte, ne croyant visiblement pas à notre retour, mais rapidement rayonne de bonheur !