Aujourd'hui, nous sommes allés renouveler mes lunettes. Il faut dire que les lunettes sont la "spécialité" de Danyang, dont les usines doivent bien produire 80 % des verres et montures de la planète ! En pratique, il existe des rues entières dans lesquelles on ne trouve que des boutiques de lunettes, dont celle où nous sommes allés, tenue par l'épouse d'un collègue du père de Q. C'est dans ce même magasin que j'avais fait faire ma paire précédente 3 ans plus tôt.

Après un rapide contrôle de vue (en Chine, on a des lignes de "E", tournés pour être ouverts aléatoirement vers la gauche, la droite, le haut ou le bas), on constate que ma correction actuelle est toujours bonne (ce que j'avais de toute façon validé il y a trois mois lors de la visite au médecin du travail).

Avec Q, nous considérons quelques montures et faisons rapidement un choix. Il faut dire qu'il y a de tout dans ces magasins, y compris des contrefaçons plus vraies que nature de quantités de marques existantes, ce qui n'est guère étonnant vu qu'elles sortent bien souvent des mêmes usines (et arborent fièrement des mentions parfaitement mensongères du genre "Made in Italy"). La monture que nous avons choisie fait partie des plus chères et la vendeuse nous dit que nous avons l’œil. Je ne sais pas si c'est vrai ou pas : nous avons juste choisi un modèle qui nous plaisait.

Vingt minutes plus tard, je repars avec mes nouvelles lunettes sur le nez. La visite n'aura pas excédé 30 minutes.

Cerise sur le gâteau, nous ne payons rien, c'est cadeau ! Naturellement, nous sommes en Chine et je ne suis pas dupe : le terme "cadeau" ne s'applique pas vraiment. Ces lunettes peuvent remercier un service rendu par le père de Q par le passé, ou en laisse présager un, à moins qu'il ne s'agisse d'une invitation au restaurant ou d'une mise en relation avec une connaissance recherchée. Pour ceux qui ont un peu voyagé ou fait des affaires en Chine, c'est comme ça que se passent les choses. Les relations sociales s'établissent au fil d'échanges de bons procédés, l'objectif du gagnant-gagnant restant de mise, faute de quoi l'une des parties perdrait la face, ce qui est inenvisageable.

En rentrant, nous retrouvons à la maison la grand-mère maternelle de Q et un couple de professeurs (nous avions déjà rencontré la femme le 24 avril). J'apprends qu'ils sont en fait de la famille, un peu éloignée, mais de la famille quand même (amusant comme dans certaines familles tout le monde ou presque est prof !). Les quatre adultes présents sont tous groupés autour de L, qui joue sa partition du gamin adorable en virtuose. Tant mieux ;) ! À l'écart, Q et moi prenons un thé et attendons de reprendre la main une fois les visiteurs partis.

Le soir venu, je pars avec Q manger une fondue avec son cousin et sa femme. Nous comptions les inviter, mais ils se débrouillent pour faire croire qu'ils se rendent aux toilettes pour payer la note. Je suis furieux, et ce d'autant plus que j'avais senti le coup venir, mais que Q n'avait pas voulu le voir et m'avait répliqué que je me faisais des idées !

Fondue individuelle
C'est la première fois que je vois ça : chacun dispose de sa propre casserole à fondue, ce qui permet de choisir le goût qui nous convient, même si cela diminue quelque peu le côté convivial.

En sortant, nous avons la navrante démonstration qu'avoir son permis en Chine ne veut pas dire maîtriser son véhicule : une bonne femme manque plusieurs fois de nous emboutir en dégageant sa voiture qui, mal garée, nous empêchait de partir. Cet épisode me laisse pensif quant au niveau de ceux qui écrivent fièrement à l'arrière de leur véhicule qu'ils ont finalement obtenu leur permis après cinq échecs successifs (le permis est bien moins difficile à obtenir en Chine qu'en France).

Pour avoir une petite idée, il est possible d'acheter une (très) bonne paire de lunettes en Chine pour un budget d'une quarantaine d'euros, verres, monture et examen de vue compris, le tout réalisé en une vingtaine de minutes. Ce prix (tout à fait correct) inclue les marges du fabriquant, du transporteur et du vendeur. Une paire équivalente vendue en France serait typiquement négociée autour de cinq à six cent euros ! C'est dire à quel point ce business est rentable dans l'hexagone (et cela explique l'explosion ces dernières années du nombre d'enseignes d'opticiens, et la facilité qu'ils ont d'offrir une deuxième ou troisième paire qui ne leur coûte somme toute quasiment rien) ! Naturellement, il est possible de trouver à Danyang bien moins cher, mais c'est dans ce cas au détriment de la qualité, ou bien plus cher, mais dans ce cas, c'est typiquement parce que le client a été labellisé "pigeon" par le vendeur !